Recherche et développement pour la défense Canada (S5 É6)
C'est une chose d'avoir un prototype en laboratoire qui peut fonctionner, c'est complètement une autre problème de transformer une nouvelle technologie dans une capacité opérationnelle. Donc ça, c'est vraiment quelque chose avec lesquels on travaille étroitement avec les Forces armées canadiennes.
Capt Orton:Salut, ici capitaine Adam Orton pour Le balado de l'Armée canadienne. Recherche et Développement pour la défense Canada ou RDDC est le cerveau derrière beaucoup de projets qui sont mis en oeuvre dans les Forces armées canadiennes. L'organisation règle les problèmes et propose des technologies intéressantes que les militaires peuvent utiliser dans leur vie quotidienne. Pour en parler, nous accueillons Jean-François Morel qui est le Directeur général des sciences et de l'ingénierie, recherche et développement à RDDC.
J-F Morel:Merci beaucoup de me recevoir.
Capt Orton:Peut-être pour ouvrir les portes, pourquoi est-ce que la science est importante dans la conduite de la guerre?
J-F Morel:Si on y pense de tout temps, la conduite de la guerre a mené à de nombreuses innovations. Ça a été le cas essentiellement depuis l'antiquité où à chaque moment, il y a eu des nouvelles technologies qui ont été intégrées dans la conduite des batailles, dans la conduite de la guerre. Et puisqu' il y a plusieurs exemples qui existent, on peut penser par exemple tout simplement à l'intégration de l'aviation durant la première guerre mondiale ou plus récemment les munitions guidées avec précision lors de la guerre du Golfe. Puis maintenant si on regarde ce qui se passe sur le champ de bataille en Ukraine, on voit que l'utilisation de drones, d'engins autonomes essentiellement est en train de aussi complètement révolutionner la conduite des opérations. Alors la science, elle est intimement intégrée dans la conduite de la guerre de tout temps.
J-F Morel:Et c'est important pour les Forces armées canadiennes d'être au fait des développements technologiques, d'être au fait des avancées scientifiques pour être en mesure non seulement de se préparer aux menaces actuelles qui sont présentes dans l'environnement de sécurité, mais aussi de se positionner pour faire face aux menaces qui vont émerger dans l'avenir et pour lesquelles il faut aussi être prêt.
Capt Orton:Et c'est quoi le rôle de RDDC dans le contexte de ces développements-là Comment est-ce que ça fonctionne
J-F Morel:Le rôle de RDDC en tant qu'organisation, c'est de comprendre les problèmes, comprendre les besoins des Forces armées canadiennes en termes de recherche et développement et d'ensuite d'appliquer la méthode scientifique pour trouver le plus rapidement possible des solutions à ces problèmes-là. Notre force de travail est composée principalement d'employés civils, donc du ministère de la Défense nationale et dont une grande proportion de scientifiques de la défense. Ces scientifiques de la défense ont acquis au cours des années une expérience très très large en matière de connaissances scientifiques dans leurs domaines d'expertise respectifs. Et le travail se fait pas en isolation évidemment à RDDC. On le fait avec toute une série de partenariats l'on maintient à la fois avec les universités canadiennes, des universités aussi étrangères, américaines ou ou européennes le plus souvent, qu'on fait également avec l'industrie canadienne, mais aussi avec les autres organisations de défense des pays alliés que ce soit les Five Eyes, que ce soit aussi les organisations au sein de l'OTAN, il faut que les Forces armées canadiennes demeurent interopérables avec ses alliés.
J-F Morel:Et si eux décident d'investir massivement dans des nouvelles technologies qui vont amener leurs forces armées dans un autre paradigme essentiellement, il faut que nous aussi on soit capable de suivre cette parade-là et puis de continuer à pouvoir interopérer avec
Capt Orton:Et en termes de personnel, en termes de grandeur, RDDC, c'est comment grand et puis c'est quoi les divisions internes
J-F Morel:Donc RDDC, c'est une organisation d'environ 1,500 personnes au sein de la défense, dont à peu près 700 scientifiques de la défense, plus d'autres travailleurs scientifiques, par exemple des ingénieurs ou des technologues qui travaillent avec avec nos scientifiques. On a six centres de recherche qui sont dédiés spécifiquement aux problèmes de la défense et un centre de recherche qui est aussi dédié aux problèmes de sécurité publique, parce qu'on a aussi ce mandat de soutenir les ministères fédéraux de sécurité publique. Donc nos centres de recherche sont situés à travers le Canada. On a un centre de recherche à Atlantique, un à Québec sur la base de Valcartier. On a deux centres de recherche situés ici dans la région de la capitale nationale à Ottawa, un à Toronto et un à Suffield sur la base militaire de Suffield.
J-F Morel:Donc vraiment notre distribution est partout à travers le Canada et on a des scientifiques qui travaillent majoritairement dans chacun de ces centres de recherche-là.
Capt Orton:Quel rôle est-ce que disons la popularité de certaines technologies joue dans qu'est-ce que vous recherchez? Par exemple, des drones, c'est quelque chose qu'on voit sur le champ de bataille toujours maintenant, tu sais, on a des imprimantes en 3D, disons l'intelligence artificielle, souvent ça c'est dans les nouvelles, certainement que d'un côté technologique, on regarde ces choses-là, puis on regarde qu'est-ce que ça fait, est-ce que vous décidez de regarder un problème dans ce domaine-là
J-F Morel:Oui, c'est une très bonne question, puis je dirais que les recherches scientifiques qu'on fait au sein de RDDC peuvent grosso modo se regrouper sous trois grandes catégories. Je dirais que la première catégorie, c'est justement ce que vous évoquez, c'est-à-dire des problèmes qui nous sont amenés directement par les Fforces, souvent par les opérateurs qui vont nous dire bon, mais en termes de, soit en utilisant une plateforme en particulier ou lors d'un entraînement ou lors d'un déploiement sur le terrain, on se rend compte qu'on fait face à tel ou tel autre problème. Est-ce que RDDC, vous êtes capable de nous aider avec ça? Donc des problèmes vraiment très rapides à régler ou parfois on va développer de nouveaux systèmes, des prototypes pour aider à régler des problèmes ou parfois simplement faire une évaluation technique puis amener des solutions qui peuvent être mises en oeuvre rapidement. Donc ça, c'est le premier type de problème auquel on fait face puis c'est souvent ça dans ce domaine-là où les avancées qu'on voit de façon la plus évidente sur le champ de bataille, c'est comme ça que ça va nous être apporté. Donc si on pense par exemple au à l'utilisation des drones présentement et puis de la nécessité de se protéger contre les drones, c'est vraiment un problème très actuel sur lequel on doit se pencher immédiatement.
J-F Morel:D'un autre côté, il y a aussi la recherche à beaucoup plus long terme parce que c'est une chose d'être conscient des problèmes auxquels on fait face maintenant qui nécessite des réponses scientifiques, mais à plus long terme, on a des défis encore je dirais plus grands. Donc quelles seront les menaces auxquelles vont faire face les Forces armées canadiennes dans 10, quinze, vingt ans. Et RDDC, c'est vraiment l'organisation qui est capable de se pencher sur ces problèmes-là, voir venir essentiellement ces futures menaces-là qui vont définir l'environnement de sécurité et tout de suite de commencer à comprendre les fondements scientifiques de ces menaces-là, mais non pas seulement du point de vue de la menace, mais aussi du point de vue des capacités des Forces armées canadiennes pour être capable d'avoir nous les capacités qui sont nécessaires pour être capable d'opérer dans l'environnement du futur. Et finalement, il y a aussi un autre type de recherche qu'on fait dans lequel on est grandement investi, qui est l'aide à des décisions. C'est-à-dire que RDDC va faire toute une série de recherches pour appuyer les Forces armées canadiennes ou les décideurs du ministère de la Défense dans toute une série de décisions complexes.
J-F Morel:On peut penser par exemple les projets d'acquisition majeurs que l'Armée canadienne doit mener souvent avoir une bonne compréhension de de la mixité d'une flotte par exemple en prenant en considération le nombre de soldats qui vont avoir à utiliser une capacité particulière là où les plateformes doivent être localisées sur les bases, les besoins en maintenance, le budget alloué. Donc c'est un problème d'optimisation parfois qui peut devenir très très complexe et on a des scientifiques à RDDC qui peuvent aider à faire des modélisations pour arriver au meilleur choix possible, aux meilleures décisions.
Capt Orton:Qu'est ce qu'on regarde en ce moment pour l'armée en termes de leurs priorités
J-F Morel:Donc en termes de notre soutien à l'Armée, il est très diversifié à l'heure actuelle au sein de RDDC, donc on est investi par exemple à l'appui de nombreux projets d'acquisition courant de l'Armée canadienne. Donc l'Armée canadienne a plusieurs projets notamment qui sont liés au commandement contrôle à l'heure actuelle. Alors on on développe divers prototypes justement de visualisation des données qui aident à mieux comprendre comment ces données-là peuvent non seulement être intégrées ensemble pour offrir un meilleur portrait du théâtre opérationnel, mais aussi en gardant en tête un peu l'opérateur dans tout ça. Donc l'opérateur qui est derrière le système et qui doit l'opérer jour après jour, est-ce qu'il est capable lui ou elle de recevoir toutes ces données-là, de faire du sens avec tout ça. Il y a aussi bon plusieurs types de recherches en termes d'appui justement à la décision comme je l'ai expliqué un petit peu plus tôt dans encore une fois essayer de voir c'est quoi le meilleur type de de flotte par exemple pour les grands projets d'acquisition, on met quand même pas mal de ressources là-dedans également.
J-F Morel:Et à plus long terme, il y a d'autres projets qui sont liés par exemple à la vision de nuit, dans lequel on investit beaucoup à l'heure actuelle. Par exemple, la visualisation 3D en termes de vision de nuit. Donc, qu'est-ce que ça veut dire? Est-ce que ça peut vraiment être quelque chose qui va améliorer les capacités? Est-ce que d'un point de vue technologique, ça peut être très très intéressant, puis ça peut amener une capacité complètement nouvelle pour l'Armée canadienne, les Forces armées canadiennes? Mais aussi en même temps, ça aussi, il faut garder l'opérateur en tête, donc il y a toute une série de recherches qui a lieu sur, est-ce que les opérateurs sont capables de maintenir ou d'opérer avec ces capacités-là pendant une bonne période de temps, est-ce que ça cause par exemple des maux de coeur ou ou de la difficulté avec la vision ou quoi que ce soit après un certain temps.
J-F Morel:Donc ça aussi, c'est des types de recherches qu'on mène à l'heure actuelle.
Capt Orton:Ça me fait penser, tu sais surtout avec la vision de nuit ou est-ce que ça va juste sur un oeil, tu ne peux pas voir tout justement en 3D, tu poigne sur toutes sortes d'affaires, tu fonces sur des choses, mais en même temps, ça, faire l'échange entre ça, puis c'est avoir des maux de coeur parce que tu n'es pas capable de gérer comme qu'est-ce qui se passe dans ton imagerie.
J-F Morel:Exactement.
Capt Orton:Ce n'est pas facile.
J-F Morel:Exactement. Donc, il faut faire attention lorsqu'évidemment on introduit des nouvelles technologies comme ça. C'est c'est une chose d'avoir un prototype en laboratoire qui peut fonctionner. C'est complètement une autre problème de transformer une nouvelle technologie dans une capacité opérationnelle qui est prouvée comme étant efficace sur le terrain. Donc ça, c'est vraiment quelque chose avec lesquels on travaille étroitement avec les Forces armées canadiennes parce que nous, on travaille dans les labos, mais il faut aussi qu'on transfère cette technologie-là dans le théâtre opérationnel.
Capt Orton:Quel rôle est-ce que les soldats jouent en termes de ces développements-là par exemple, tu sais même en y parlant juste maintenant sur le Balado, je suis sûr qu'il y a un soldat à quelque part qui voudrait l'essayer là, tu sais, ils veulent, ils veulent toucher à ça, juste le tester. Comment est-ce que vous appliquez vos nouvelles technologies envers les soldats pour faire un test véritable de l'équipement?
J-F Morel:On travaille très très étroitement avec les soldats dans la mise en oeuvre de tout ce dont on a parlé. Donc on va participer par exemple, envoyer nos scientifiques lors d'entraînement ou d'exercice pour essayer des nouvelles technologies, voir si ça peut fonctionner. On va faire appel justement aux militaires aussi pour être des des testeurs essentiellement des des nouvelles technologies qu'on va mettre en place pour recueillir les les commentaires et voir si justement on s'en va dans la bonne direction parce que parfois comme je l'ai dit la meilleure idée scientifique technologique est peut-être pas applicable sur le terrain opérationnel alors c'est important d'avoir ces changements-là, cette rétroaction et donc c'est fait constamment. Un des bons exemples notamment, c'est tout ce qui concerne les nouvelles capacités qui existent en termes de vêtements pour les opérations dans l'Arctique. Donc on travaille très très étroitement avec les Forces armées canadiennes, notamment l'Armée canadienne pour voir si les nouvelles technologies qui existent dans ce domaine-là, des nouveaux matériaux notamment, est-ce qu'ils fournissent non seulement la bonne protection contre le froid, mais aussi contre l'humidité, est-ce qu'ils permettent une bonne mobilité dans le cadre des opérations, et caetera, et caetera.
J-F Morel:Alors il n'y a rien comme travailler justement avec les membres des Forces armées canadiennes pour avoir ces données-là.
Capt Orton:Vrai puis si on pense par exemple en termes d'équipement arctique, on se dit ah oui c'est ce, seulement j'avais comme le linge qui se chauffe par lui-même en utilisant des batteries puis là on réalise que comme de la laine ça a toujours fonctionné, ça fonctionne bien mieux, puis des batteries ça dure juste un certain montant de temps tandis que si on est là pendant comme quatre semaines, ben talend ça va faire la job.
J-F Morel:C'est ça, il y a beaucoup beaucoup de recherches qui sont investis dans ce domaine-là justement à savoir est-ce que ces vêtements-là qui existent maintenant qui fonctionnent avec des batteries, est-ce que c'est vraiment une une bonne utilisation de la technologie pour régler certains problèmes Peut-être dans certaines circonstances, mais pas tout le temps. Alors on a des scientifiques qui sont appelés à travailler sur ces domaines-là aussi.
Capt Orton:Et est-ce qu'il y a un domaine en particulier où est-ce qu'on voit vraiment beaucoup de croissance dans le domaine de recherche?
J-F Morel:Il y a beaucoup de domaines qui nous préoccupent à l'heure actuelle, donc on investit beaucoup d'efforts par exemple à mieux comprendre toutes les questions liées à l'autonomie, Donc justement l'utilisation des drones, des systèmes d'armes autonomes, c'est quelque chose sur lequel il faut se pencher à l'heure actuelle, reconnaissant évidemment toutes les limites aussi politiques et illégales qui concernent ça, mais en termes de recherche et développement, c'est important pour nous de le comprendre, non seulement pour être en mesure de savoir quelles capacités sont là, mais aussi pour positionner les forces armées canadiennes face aux menaces qu'ils peuvent rencontrer sur le terrain de bataille. Donc ça, c'est un domaine qui nous préoccupe particulièrement. Le domaine des âmes à haute énergie est aussi un autre domaine dans lequel on investit passablement. C'est un domaine assez intéressant notamment pour justement dans le contexte des contre-mesures contre les drones entre autres, c'est peut-être là une application qu'on pourrait voir à l'avenir aussi pour faire face aux engins explosifs improvisés qu'on peut rencontrer sur le champ de bataille un peu partout. Donc les armes laser pourraient être une bonne capacité à mettre en oeuvre dans ce domaine-là.
J-F Morel:Un autre domaine qui nous intéresse particulièrement et dans lequel on sait qu'on va devoir investir davantage ce qu'on appelle en anglais la synthetic biology ou les nouvelles applications en termes de biologie, c'est-à-dire comment on peut joindre à la fois l'ingénierie et la biologie pour développer des nouveaux systèmes biologiques qui n'existent pas dans la nature normalement et qui peuvent peut-être nous donner des nouvelles capacités en termes de censeurs par exemple. Et ça ça pourrait être un domaine très intéressant dans lequel on souhaiterait investir davantage.
Capt Orton:Est-ce que vous pouvez nous donner un exemple de comme la biologie synthétique qui s'appliquerait dans un domaine militaire
J-F Morel:Par exemple ce qu'on voit des applications possibles dont on entend parler, c'est notamment des plantes qui pourraient changer de couleur par exemple ou devenir luminescentes au contact de gaz toxique. Donc c'est c'est un des exemples qui est souvent évoqué, qui permettrait justement d'identifier des problèmes sur les champs de bataille ou quoi que ce soit de façon immédiate sans avoir recours à d'autres types de censeurs. Donc c'est un peu des avancées comme ça qu'on voit vraiment plus tard dans l'avenir. On parle ici de probablement quelques dizaines d'années avant que ce soit applicable, mais il y a des recherches déjà qui sont faites dans ces domaines-là.
Capt Orton:Ça me fait passer un film de science-fiction je suis sûr. Et on a exploré déjà dans un balado séparé au sujet de les sciences humaines, on pense dès fois que la technologie, tu sais, c'est, on invente un meilleur fusil, on invente une meilleure armure, puis c'est tout un une escalade, mais il y a aussi tout un domaine en dehors des sciences dures qui est comme la science de l'humanité. Comment est-ce que vous regardez cet aspect-là?
J-F Morel:En effet, c'est un autre domaine dans lequel on est complètement investi à RDDC. Donc, je dirais que la majorité de nos scientifiques sont malgré tout des des gens qui ont des spécialisations soit en physique, en ingénierie, en chimie, donc les sciences pures, les sciences naturelles. Mais on a aussi une bonne proportion de scientifiques qui sont davantage des spécialistes de sciences sociales ou même d'histoire jusqu'à un certain point parce que pour parfois apprendre les leçons apprises, c'est très très utile pour être capable de se positionner pour le futur. Donc, on a par exemple beaucoup de psychologues qui travaillent avec nous et qui ont notamment appuyé au sein des derniers mois tous les efforts de la défense nationale en matière de conduite professionnelle, des changements de culture, et caetera. On a des spécialistes en sciences politiques, par exemple, qui peuvent aider aussi dans l'analyse, la mise en oeuvre des nouvelles technologies certaines barrières auxquelles on fait face d'un point de vue politique, donc ils peuvent faire ce type d'analyse-là.
J-F Morel:Et puis évidemment, on a des analyses stratégiques qui appuient certaines organisations comme le chef du Développement de la force et d'autres dans la définition des concepts, des doctrines parce qu'il y a beaucoup de de recherches qui doit être faites de ce côté-là aussi parce que c'est ça au final qui va guider un peu où où les Forces armées canadiennes vont investir dans l'avenir donc c'est très important aussi.
Capt Orton:Comment est-ce que vous décidez comment vous allez former vos équipes? C'est sûr que par exemple, dans un contexte, admettons on regarde des drones, ça c'est un environnement spécialisé où est-ce que peut-être on parle de la robotique ou des signaux de communication, mais peut-être dans l'intelligence artificielle, ça, c'est un autre domaine, donc ça prend des experts dans d'autres domaines. J'imagine que créer ces équipes-là, ça doit être un assez grand défi parce que s'il y a quelque chose qui se développe, puis on regarde, ah ça, il faut travailler là-dessus maintenant, avoir des ressources qui ne sont pas nécessairement là, il faut les former ces équipes-là, comment vous gérez ce problème-là?
J-F Morel:C'est une chose qui me garde réveiller la nuit, c'est celle-là. Parce que mon rôle, c'est essentiellement celui-là, c'est de s'assurer qu'on a l'expertise scientifique et les capacités scientifiques pour faire face aux problèmes du futur. Être un spécialiste de la science de la défense, donc nos scientifiques de la défense, c'est pas quelque chose qui peut se développer facilement à l'extérieur du ministère de la Défense et à l'extérieur de notre organisation. C'est des domaines d'expertise très très précis, très ciblés, très spécialisés. Et puis pour de très bonnes raisons, c'est aussi des domaines qui ne s'enseignent pas nécessairement à l'université.
J-F Morel:Par exemple la RDDC, on a des spécialistes en armes chimiques et biologiques, puis évidemment que ce n'est pas quelque chose qu'ils ont appris à l'université, c'est de la recherche qui est hautement surveillée, réglementée qu'on doit mener avec des gardes fous importants et nombreux. Puis c'est normal que cette recherche-là se fasse à l'interne et sous la bonne surveillance. Donc cette recherche-là aussi elle est faite uniquement dans le contexte de la défense. Donc légalement on n'a pas le droit par exemple de développer des armes chimiques, donc c'est interdit par des conventions internationales. Donc au Canada, on doit comprendre la menace pour développer des protections pour nos soldats en particulier.
J-F Morel:Donc c'est là-dessus que nos scientifiques se penchent. Et donc évidemment, développer cette connaissance-là, ça prend des années. On embauche des gens qui ont des doctorats, même des post-doctorats et malgré tout ça leur prend souvent une fois qu'ils joignent notre organisation cinq, six, dix ans à devenir complètement à l'aise dans les domaines de recherche qu'ils poursuivent parce que c'est une connaissance qui est vraiment unique. Donc nous à RDDC qu'on décide d'embaucher un scientifique, c'est souvent une décision qu'on prend pour vingt-cinq, trente ans. C'est très important qu'on fasse les bons choix et la façon de le faire, on a plusieurs façons d'évaluer ça.
J-F Morel:Donc on a des équipes de prospective, on se fie aussi beaucoup à l'expertise même de nos scientifiques qui ont une base de connaissances très très large et qui sont capables de venir voir si vous voulez les différents domaines scientifiques, où s'en vont les développements. Et donc ça nous permet de notre côté de faire les meilleures décisions possibles en termes d'investissement, non seulement pour avoir les bonnes capacités, mais aussi ça prend la bonne infrastructure, les bons labos, les bons équipements pour être capable de de faire le travail.
Capt Orton:On voit souvent les soldats étant assez sceptiques quand on parle des technologies comme des lasers, puis toutes sortes de choses comme ça, dans le sens que, ah ça fait des années avant qu'on aille ça ou c'est comme je serai même plus dans les Forces quand ça va arriver. Les technologies dont vous parlez, c'est des choses qu'on travaille dessus en ce moment-là, comme il y a des soldats qui ont probablement au moins un ou deux soldats à un certain point dans un laboratoire ou ont touché à ces affaires-là en ce moment.
J-F Morel:Oui absolument. Donc il y a des domaines qui sont davantage du domaine du futur, je dirais, on parlait de de biologie tout à l'heure, des des applications, ça on parle plus véritablement, on parle de dix à quinze ans à tout le moins avant qu'on voit des avancées vraiment importantes opérationnelles. Alors qu'il y a d'autres domaines où les avancées vont sans doute être beaucoup beaucoup plus rapides ou même qui existent déjà. Donc les systèmes autonomes, il y en a déjà en application maintenant, ça va simplement s'améliorer et à vitesse grand v. Ce qu'on voit dans le domaine technologique, par exemple avec l'intelligence artificielle, les développements extrêmement rapides.
J-F Morel:Donc, on sait que les systèmes d'armes autonomes vont devenir une menace de plus en plus grande dans l'environnement de sécurité. Donc, comment on fait face à ce problème-là? Ça, c'est un des questions majeures et ça, c'est très très très actuel. Il y a d'autres applications, par exemple, on parle beaucoup de la technologie quantique ces temps-ci, le gouvernement du Canada a une stratégie pour faire avancer les les technologies quantiques au Canada. On voit qu'il y a des applications très intéressantes pour le domaine de la défense encore une fois en termes de développement de censeurs, en termes de capacités informatiques, essentiellement avec l'informatique quantique ou aussi en termes de communication ou qui nous permettrait entre autres d'avoir des communications très sécurisées qui seraient à peu près impossibles à intercepter ou qui nous permettraient d'adresser des problèmes qui sont tellement complexes que les ordinateurs actuels ne sont pas capables de résoudre.
J-F Morel:Donc l'informatique quantique pourrait nous amener des des avancées importantes. Donc là, on en est rendu où on, les scientifiques se penchent sur ces domaines-là, connaissent la science, connaissent les applications possibles. Maintenant, on en est dans des problèmes importants d'ingénierie. Donc comment on rend ça On passe du laboratoire justement au terrain et c'est là et et les avancées, on va les voir peut-être dans les cinq à dix prochaines années où on va avoir des des avancées vraiment très très importantes dans ce domaine-là.
Capt Orton:On vous remercie vraiment pour votre appui, ça veut dire qu'on a de besoin.
J-F Morel:Merci, ça me fait plaisir.
Capt Orton:Oui, merci d'avoir participé au Balado.
J-F Morel:C'est un véritable plaisir, merci beaucoup de m'avoir invité.
Capt Orton:Tout à fait. Ça, c'était Jean-François Morel qui est le Directeur général des sciences et de l'ingénierie R&D à RDDC. Moi je suis capitaine Orton pour Le balado de l'Armée canadienne. Prenez soin de vous!