Opération UNIFIER (S2 É4)
[Musique commence]
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Le but de notre mission en Ukraine n'est pas d’imposer notre façon de faire à nos partenaires, mais bien de les aider à développer leur propre façon de procéder.
Capitaine Adam Orton : Salut! Ici le capitaine Adam Orton du Balado de l’Armée canadienne. Ceci est notre première émission avec quelqu’un qui est actuellement en déploiement. Lieutenant-colonel Sarah Heer est la commandante de la force opérationnelle en Ukraine, soit Opération UNIFIER et elle va nous parler un petit peu de ses expériences jusqu’à date.
Bienvenue au balado madame!
[Musique Termine]
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Merci beaucoup Adam. Ça fait plaisir d’être ici avec vous aujourd’hui.
Capitaine Adam Orton : Merci beaucoup! Donc premièrement, parlez-nous un peu de votre carrière militaire!
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Bien sûr! J’ai joint les Forces armées canadiennes en 1997 lorsque je suis rentrée au Collège Militaire Royal du Canada, et à ma sortie je suis devenue officier d’artillerie. J’ai servi pendant longtemps dans le 2e Régiment, Royal Canadian Horse Artillery. J’ai une expérience de travail au niveau tactique, une variété d’expériences opérationnelles, et j’ai eu quelques affectations dans divers organisations institutionnelles comme le Collège des Forces canadiennes, j’étais un gestionnaire de carrière, le directeur des droits de la personne et de la diversité, et j’ai travaillé à l’état-major interarmée stratégique. Je suis présentement la commandante du 2e Régiment du Royal Canadian Horse Artillery et la commandante de l’Opération UNIFIER, et ça c’est la mission militaire canadienne en Ukraine et je suis mariée et je suis la mère de deux adolescentes.
Capitaine Adam Orton : C’est pas que le résumé!
Lieutenant-colonel Sarah Heer : [Rires] Merci!
Capitaine Adam Orton : Donc, est-ce que vous pouvez nous expliquer un peu c’est quoi votre rôle comme commandante d’Opération UNIFIER?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Bien sûr! Je suis responsable de la sûreté et de la sécurité de tous les membres des Forces armées canadiennes en Ukraine et en tant que commandante, j'attribue des tâches à nos divers groupes de formations, et quand ça y’est pour fournir l’aide nécessaire au renforcement des capacités de nos partenaires ukréniens.
Je joue également un rôle important dans la promotion du travail de notre force, et dans la recherche d’occasions d’engagement supplémentaires lors de mes réunions avec les officiers supérieurs de l’Ukraine à travers le pays. En tant que commandante, j’ai également la responsabilité de fournir des mises à jour sur nos progrès et des recommandations à notre quartier général supérieur et c'est le commandant des opérations interarmées du Canada. À chaque rotation et seulement six mois et ceci fait que les recommandations du commandant présent sur le terrain sont essentielles afin de façonner le futur de la mission pour la prochaine rotation.
Capitaine Adam Orton : Donc, c’est quoi les difficultés qui sont liées, peut-être pas difficultés mais les défis qui sont liés à être un commandant dans un environnement outremer?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Oui, pour moi, l’un des principaux défis est la dispersion de nos membres. Nos équipes sont dans plus de 12 locations à travers l’Ukraine. On est dispersé jusqu’à 10 heures de distance de notre quartier général. Compte tenu de cette dispersion, il est important pour moi de donner des directions claires au début de la mission afin de partir du bon pied.
J’avais pleinement confiance dans le fait que l’Armée canadienne a développé des leaders extrêmement compétents et professionnels, et j’ai donc pu compter sur mon équipe afin de me tenir informée de la situation sur le terrain afin d’appuyer ma prise de décision.
L’approche que j’ai utilisée Adam a consisté à réunir nos membres occupants des postes-clé afin de discuter des problèmes complexes à certains moments de déploiements dans un environnement collaboratif pour s’assurer que toutes les perspectives étaient retenues.
J’ai trouvé que cette collaboration m’a permis de prendre facilement des bonnes décisions. Si je peux, un autre défi de ce déploiement est la santé et le bien-être de nos membres face à des dangers comme la Covid-19. Des mesures sont mises en place pour atténuer les risques sur la santé et la sécurité de nos membres et le leadership à tous les niveaux est impliqué dans ces mesures afin d’assurer le bien-être de nos membres.
Capitaine Adam Orton : Vous avez fait mention au début de d’autres déploiements dont vous avez fait partie, est-ce que vous pouvez parler peut-être un petit peu de ces déploiements là et peut-être comment est-ce qu’ils ont contribué à votre succès en ce moment à Op UNIFIER?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : J’ai cinq déploiements à mon actif. En 2002, j’ai été déployée à Kaboul en Afghanistan en tant qu’officier subalterne. J’ai également pris part à deux déploiements en tant qu’officier d’opérations de compagnie avec l’équipe d’intervention en cas de catastrophes, une fois au Sri Lanka, après le tsunami une fois en 2004, puis à Haïti en 2010 après le tremblement de terre. En 2018, j’ai été déployé au Koweït, intégrée au quartier général de la force opérationnelle interarmée multinationale Op INHERENT RESOLVE. Et finalement mon déploiement maintenant.
N’importe quelle mission, je pense qu’il y a deux constantes qui reviennent toujours et pour moi c’est l’adaptabilité et le professionnalisme. Je pense que n’importe quelle mission, c’est très important de toujours être flexible, ouvert d’esprit et capable de s’adapter aux situations changeantes.
Il faut également être consciente que le résultat final peut être différent de ce que nous voulions atteindre, mais que le progrès est la variante la plus importante. Pour cette mission, l’Op UNIFIER, la patience tactique est très importante parce qu’on essaye de façonner la prochaine génération de soldats ukrainiens. C’est quelque chose d’essentiel puisque les soldats des forces de sécurité d'Ukraine, ce qui signifie que vous pouvez attendre comme dix ou vingt ans pour une changement culturel durable.
De plus, on parle souvent du professionnalisme ici dans les Forces armées canadiennes et c’est l’aspect le plus important pour moi lorsque vous représentez votre pays à travers le monde. Notre crédibilité en tant que professionnel militaire est essentielle et nous devons démontrer à nos partenaires du monde entier l’éthique et les valeurs des Forces armées canadiennes. Tout ce que nous faisons à l’étranger se situe dans l’espace public et je dis à chaque soldat de notre équipe qu’ils sont des ambassadeurs canadiens à l’étranger et qu’ils doivent toujours démontrer un professionnalisme exemplaire 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
Capitaine Adam Orton : J’apprécie vraiment que vous avez dit que des fois quand on travaille dans un environnement de déploiement, on a dans notre tête ce qu’on essaie d’accomplir, mais on a pas toujours les résultats qu’on cherche. Donc on oublie peut-être souvent cette réalité-là que les choses changent sans qu’on s’en attende. Dans votre carrière, vous avez également fait mention que vous êtes responsable de la diversité dans les Forces armées canadiennes. De quelle façon est-ce qu'une bonne compréhension de cette diversité-là aide les soldats dans un environnement tel que Op UNIFIER en Ukraine.
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Pour moi, Adam, c’est très important de comprendre l’importance de la diversité. Ça élargit notre perspective et améliore notre capacité à amasser des informations, d’améliorer l’accessibilité et l’efficacité de notre interaction avec la population locale. À Op UNIFIER, la diversité de notre force opérationnelle nous a permis d’avoir une portée et un impact bien plus grand que nous aurions pu avoir avec un seul groupe homogène. Avec plus de 200 maître de plus de 40 métiers différents, des hommes, des femmes, de la force régulière et de la réserve, cela nous aide grandement à mettre en oeuvre des programmes de formation et de renforcement des capacités et nous permet également de soutenir efficacement les aspirations ukrainiennes à atteindre leur nombre interopérabilité de l’Otan.
Je voudrais, si je peux Adam, également souligner la diversité de notre offre de soutien à la formation. Nous sommes le seul pays activement engagé dans le développement des académies, officiers, le développement des collèges des sous-officiers, la formation spécialisée individuelle et formation collective pour les Forces armées de la garde nationale de l’Ukraine et des Forces armées ukrainiennes.
Capitaine Adam Orton : C’est pas que le point de dire que on est le seul pays qui contribue dans cette manière là donc c’est pas que l’importance ça. Quels sont les principaux défis que les soldats doivent se préparer à relever lorsqu'ils s’apprêtent à être déployés?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Oui, le premier défi est sans aucun doute la mention d’une culture autre que celle du Canada. Il faut comprendre que les valeurs et la culture que l’on retrouve à l’étranger sont bien souvent différentes de la nôtre que ce soit au niveau de l’interaction personnelle comme la culture et la religion. Nous pouvons penser à des choses aussi banales que l’heure à laquelle on prend nos repas. Au Canada, on prend notre dîner entre 11 h et 13 h. En Ukraine c’est 13 h à 15 h. Cela peut ne pas sembler important, mais c’est très important quand nous devons connaître afin de créer un horaire d’entraînement ou s’adapter à l’heure. Se renseigner sur la culture locale est définitivement quelque chose que nos membres doivent faire avant le déploiement, et c’est pour cela que les Forces armées canadiennes offrent des formations sur la culture du pays hôte lors de l’entraînement du pré-déploiement.
De plus, un autre défi est la langue. Il faut s’adapter à communiquer de manière efficace au travers d’un linguiste. Les blagues ainsi que certaines expressions ne se traduisent pas facilement. Nous devons les garder simples et concises afin de garantir que notre message passe et que nous puissions maintenir ouvertes les voies de communication avec nos alliés.
Et finalement, Adam, il faut que nos membres soient ouverts d’esprit et qu’ils soient flexible dans leur approche avec nos alliés et la communauté du pays hôte. Le but de notre mission en Ukraine n’est pas d’imposer notre façon de faire à nos partenaires, mais bien de les aider à développer leur propre façon de procéder. Et ceci amène nos membres à faire des compromis ainsi qu’ils pensent à des solutions, des façons de faire qui sont communes à nos deux cultures.
Capitaine Adam Orton : J’aime que vous ayez fait mention de la difficulté de travailler dans un environnement où la langue est différente. Puis on en a parlé un petit peu pendant le balado du centre de formation pour le soutien de la paix que tu sais c’est pas toujours facile. Il y a beaucoup d’interprétation dans cet environnement-là donc. J’apprécie vraiment que c’est quelque chose d’assez difficile.
En parlant un peu de peut-être vos expériences dans cet environnement-là, quelle leçon est-ce que vous avez apprise lors de votre position de commandement dans Op UNIFIER?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Quelques leçons que j’ai retirées sont premièrement toujours faire confiance à votre instinct. En tant que commandante, je suis rarement confrontée à une décision facile. Normalement, les décisions auxquelles je suis confronté sont bien plus complexes et demandent de trancher entre deux choix qui ne sont pas nécessairement idéal. Il est alors impératif de choisir celle qui perturbe le moins notre équipe. Face à ces décisions, j’écoute les conseils et les recommandations de mes conseillers de confiance comme le sergent-major et le commandant adjoint de la force opérationnelle ainsi que les recommandations de mon équipe afin d’analyser les risques et les façons de les atténuer. Cependant, je fais toujours confiance à mon instinct. Il est également essentiel de diriger avec empathie. La vie continue à la maison pendant que nous sommes déployés et nous ne pouvons pas perdre de vue l’implication que ceci peut avoir sur nos soldats lorsqu’ils sont déployés. En tant que leader, vous devrez être pleinement investi dans le bien-être et la santé mentale de vos soldats. Et l’on doit démontrer en permanence que vous vous souciez d’eux et que vous êtes à leur disposition à tout moment lorsqu’ils ont besoin de vous.
Capitaine Adam Orton : J’apprécie vraiment que vous ayez fait mention de faire confiance à vos soldats. Ça me fait penser au cours de commandant de peloton où il y a une diapositive qui dit qu'une des plus grosses difficultés, c’est de faire confiance à vos personnes et s’assurer qu’ils suivent vos intentions. Puis c’est juste une diapo puis on en reparle pas. Mais vraiment c’est peut-être une des plus grandes difficultés d’être dans une position de leadership. Donc j’apprécie vraiment que vous fassiez mention de ça. Donc comment se déroule votre déploiement jusqu’à date?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Oui, le déploiement se déroule très bien. L’un de nos objectifs est de renforcer notre relation avec l’Ukraine et notre rotation remplit définitivement ce mandat. Je suis extrêmement fière du travail que nous avons pu accomplir ensemble en fournissant une assistance aux forces de sécurité de l’Ukraine tout en tenant compte des risques liés à la Covid-19. Par exemple, nous sommes engagés dans le développement des officiers à l’académie nationale de l’armée, le développement de sous-officiers, et nous entraînons les forces armées de l’Ukraine ainsi que la garde nationale.
Bien que nous soyons dans un environnement où la Covid-19 est présente, ceci n’a pas affecté de façon majeure notre capacité à remplir nos missions. Nos membres font un travail supérieur. Ils sont de très bons ambassadeurs du Canada, et bien que nos forces soient dispersées au travers du pays, tous les membres contribuent au succès de notre mission. De plus, nous avons à notre actif plus de 155 engagements avec les régions des forces de sécurité ukrainiennes et nos partenaires. Nos membres ont contribué à divers engagements et évènements de charité en lien avec les populations ukrainiennes qui ont touché différents groupes comme les vétérans, et les gens et les enfants dans le besoin et bien d’autres.
Si je peux Adam, mes objectifs d’ici jusqu’à la fin de notre rotation, c’est d’avoir une transition en douceur avec la rotation entrant et de ramener tous nos membres à la maison en bonne santé et en toute sécurité au Canada.
Capitaine Adam Orton : Ça c’est vraiment une belle place pour terminer le balado. Est-ce que vous avez autre chose que vous voulez ajouter madame?
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Non, je pense pas, mais c’était mon plaisir et merci beaucoup pour l’occasion de vous parler de notre travail qu’on fait ici en Ukraine.
Capitaine Adam Orton : Merci beaucoup d’avoir pris le temps!
Lieutenant-colonel Sarah Heer : Pas de problème.
[Musique commence]
Capitaine Adam Orton : Ça c’était lieutenant-colonel Sarah Heer, commandante de l’Opération UNIFIER en Ukraine. Moi je suis capitaine Adam Orton du Balado de l’Armée canadienne, prenez soin de vous.
[Musique termine]