[Musique commence]

Dominique Laferrière : Des militaires qui consomment de la désinformation peuvent en venir à utiliser l’entraînement qu’ils ont potentiellement même l’accès à de l’information ou l’accès à des armes de manière antidémocratique.

[Musique continue]

Capitaine Adam Orton : Salut, ici capitaine Adam Orton avec Le balado de l’Armée canadienne. Depuis des milliers d’années, les armées se battent les unes contre les autres sur le champ de bataille, mais il est facile d’oublier que la guerre de l’information est une tactique qui est utilisée depuis la nuit des temps.

Grâce à l’Internet, la géographie n’est plus le seul obstacle qui sépare l’ennemi d’une attaque. Ici pour nous parler un peu plus du sujet de la désinformation, nous avons docteure Dominique Laferrière qui est une spécialiste des sciences sociales, qui travaille avec les Forces armées canadiennes et a effectué de nombreuses recherches sur le sujet. Bienvenue au balado?

Dominique Laferrière : Merci!

[Musique termine]

Capt Orton : Donc, il y a 10 à 15 ans, on parlait peut-être un peu moins de la désinformation, maintenant on en parle pas mal. Pourquoi est-ce que ça a changé?

Dominique Laferrière : Je dirais que probablement parce que nos vies se déroulent beaucoup plus en ligne qu’avant, donc la plupart d’entre nous passons beaucoup de temps sur les réseaux sociaux par exemple. Et le cyberespace est un terreau particulièrement fertile pour la désinformation, puis il y a quelques éléments qui permettent d’expliquer pourquoi le cyberespace est si prompt si on veut à la désinformation.

Premièrement, c’est qu'il n’y a pas de barrière à l’entrée. Donc, la plupart d’entre nous avons déjà vu des gens dans leur sous-sol ou dans leur voiture exprimer leur opinion puis partager ça sur les réseaux sociaux par après. Ça c’est de l’information qui fait partie de notre écosystème informationnel puis qui compétitionne si on veut avec d’autres types d’information. Donc c’est ce que je veux dire par il n’y a pas de barrière à l’entrée, c’est que n’importe qui peut créer du contenu, peut créer de l’information qui peut être après ça consommé par les membres du public cible. À une autre époque, quand on voulait se renseigner, on voulait savoir ce qui s’était passé dans une journée, on devait attendre l’édition des journaux, de la journée pour nous expliquer ce qui s’était passé. Quand on voulait avoir de l’information sur un sujet X, on consultait des encyclopédies, des livres. Bon là, j’ai l’air de parler de trucs qui se sont passés dans l’ancien temps, mais c’est quand même comme ça que ça se déroulait. Et maintenant, l’information est beaucoup plus accessible, ce qui est très bien, mais il y a aussi une multiplicité des sources d’information incluant des sources qui ne sont pas nécessairement toutes autant crédibles. Puis, parallèlement à ça, il y a des études qui démontrent qu’il y a une large proportion de la population qui est pas vraiment outillée pour digérer si on veut, pour intégrer toute cette information-là de manière efficace. Donc les gens dans le fond n'ont pas nécessairement les compétences médiatiques ou la littératie informationnelle nécessaire pour distinguer l’information qui est crédible de l’information qui est peut-être un peu moins crédible.

Capt Orton : C’est sûr. Puis vous avez fait mention aussi des barrières d’accès sont très limitées puis ça a aussi créé un environnement où une personne peut avoir plusieurs identités en ligne qui crée encore plus de sources d’information, puis ça devient un peu plus difficile = gérer.

Dominique Laferrière : Absolument, puis c’est pas juste des personnes qui peuvent avoir plusieurs identités, ça peut être des regroupements de personnes avec des intentions dommageables ou des intentions qui crées des profils, qui prétendent être quelqu’un, qui prétendent être un organisme légitime ou crédible qui eux dissémine volontairement de la fausse information. Donc toutes ces choses-là sont possibles qui rend le cyberespace encore plus difficile à naviguer.

Capt Orton : Puis en parlant d’une désinformation, c’est sûr que la majorité des gens ont certainement au moins rencontré le concept ou ils ont fait une considération vécue ou quelque chose, mais peut-être d’une perspective plus informée. Est-ce que vous pouvez peut-être décrire qu’est-ce que c’est puis c’est quoi peut-être les méconceptions qui tournent à l’entour de ça?

Dominique Laferrière : J’ai l’impression, mais c’est peut-être une impression qui est biaisée par le fait que je travaille sur ces questions-là. Mais j’ai l’impression que la plupart des gens, comme vous le dites, ont une certaine compréhension de ce que c’est la désinformation. Nous la désinformation, dans les travaux que j’ai faits, on la définit comme une information fausse qui est véhiculée de manière volontaire afin d’atteindre un objectif spécifique. Donc, c’est vraiment la question de l’aspect volontaire qui est important ici et qui distingue la désinformation de la mésinformation qui elle est une fausse information qui est disséminée de manière involontaire. Donc, on peut toutes et tous penser à quelqu’un dans notre famille. Moi j’ai quelques exemples qui me viennent en tête, mais que je ne dirais pas ici parce que non, je ne veux pas avoir des chicanes de famille après ça, mais on a toutes et tous des gens qui nous viennent en tête qui partagent de l’information sans vraiment soit sans avoir lu l’article ou parce que il et elle pensent que l’information est vraie. Dans cette situation-là, on ne parle pas de désinformation, on parle de mésinformation. Une chose qui faut savoir par contre c’est que les effets potentiellement négatifs sont plus ou moins les mêmes de la mésinformation ou de la désinformation. L’information est fausse et elle continue à circuler que la personne le fasse volontairement ou pas. Donc les deux peuvent avoir des conséquences négatives.

Capt Orton : En termes de personnes qui consomment de l’information, c’est quoi les plus grandes sources de désinformation?

Dominique Laferrière : Bien le cyberespace c’est un espace qui est populeux et populé par beaucoup beaucoup d’acteurs. Mais je pense que quand on pense aux gros joueurs qu’on connaît dans l’espace de la désinformation, on peut penser à des pays comme la Russie par exemple. Peut-être un exemple que je peux donner qui va potentiellement résonner avec les auditeurs et les auditrices, c’est une campagne de désinformation qui a été menée par la Russie pendant les élections présidentielles américaines de 2016. Donc on a un exemple concret de désinformation menée par un gouvernement dans ce cas-là. Et ce qui est intéressant, quand je définissais la désinformation un peu plus tôt j’ai dit que c’était de la fausse information qui est disséminée volontairement pour atteindre un but. Mais des fois le but, ce n’est pas un but spécifique dans le sens où je veux que personne X fasse chose Y. Des fois, ça peut être un peu plus large que ça ou un peu plus flou que ça. Par exemple, la plupart des analyses que j’ai lues sur cette campagne de désinformation-là disent que le but ultime, c’était de juste semer le chaos. En gros, parler de et de disséminer de la fausse information sur un paquet de sujets qu’on sait qui sont polarisant et qui polarisent les gens au sein de la société américaine peu importe du côté de l’électorat où les gens se situent. Donc le but c’était vraiment comme je l’ai dit de créer le chaos, puis malheureusement on voit un peu les répercussions de ça aujourd’hui.

Capt Orton : C’est ça puis véritablement c’est que on n’a pas besoin nécessairement d’avoir un effet parce que le chaos comme vous dites ça créé des délais, ça crée des problèmes, puis juste en général ça a un impact sur la société qui n’est pas positive, puis vraiment des fois, c’est juste ça que tu as besoin.

Dominique Laferrière : Oui, c’est ça.

Capt Orton : Donc, avec tout ça c’est quoi l’impact que la désinformation peut avoir sur la Défense puis les militaires?

Dominique Laferrière : Il y a deux formes principales de façon que la désinformation peut affecter les militaires. La première, c’est les campagnes de désinformation qui cherchent à dépeindre les militaires d’une manière fausse. Donc qui ont comme objet central de la campagne de désinformation les militaires. La deuxième façon, c’est de développer une campagne de désinformation et d’avoir comme public-cible les militaires.

Donc, je recule, premier exemple, je vous amène dans les Pays baltes et en Pologne, la présence avancée, mise sur place par l’OTAN en 2017, il y a 4 groupements tactiques qui sont sur place et les 4 ont été ciblés par des campagnes de désinformation. Donc par exemple les Anglais et les Allemands ont été accusés de toutes sortes de comportements, permettez-moi l’expression un peu dégueulasse comme débauche complètement alcoolisés, maltraiter les femmes locales, permettez-moi encore une fois l’expression, se pogner avec la police locale. Les Canadiens ont aussi été dépeints de manière fausse dans cette campagne de désinformation-là. Donc, on a accusé les Canadiens de vivre dans des appartements luxueux aux frais des lettons. On a aussi accusé tous les groupements tactiques de propager la COVID-19. Et toute cette information-là était fausse. Donc le but de ces campagnes-là ultimement, c’est de diminuer la crédibilité de la présence avancée dans la région, de diminuer la crédibilité des Forces armées qui sont sur place, et aussi d’augmenter les tensions avec les populations locales. Donc là, le type d’impact que ce type de campagne de désinformation-là peut avoir, on parle d’impact négatif sur la sécurité opérationnelle, puis l’efficacité opérationnelle.

Deuxième exemple, c’est un exemple tiré d’une étude qui a été faite par Vietnam Veterans of America aux États-Unis qui ont analysé plusieurs pages Facebook supposément mises sur place et tenues par des organisations de vétérans. Et ce que l’étude a démontré, c’est que beaucoup de ces pages-là faisaient de la personnification. Donc, c’était des fausses pages, en fait c’était des pages qui prétendaient être tenues par des vétérans qui utilisaient des photos de vraies associations ou des noms de vraies associations ou qui ressemblaient à pour attirer les vétérans dans la population. Et il y avait tout un paquet de messages positifs qui tournent autour de la fraternité, autour de la communauté des vétérans. Et entremêlé à tout ça, il y avait des messages polarisant finalement qui étaient partagés aussi par ces pages Facebook-là.

J’ai un exemple qui me vient en tête, c’est une image puis là évidemment je vais essayer de vous décrire une image sur un podcast, mais en tous les cas. Imaginez-vous un visage de proche d’un homme qui a l’air pas bien, il est tout déprimé, puis un gros titre autour de son visage qui dit ‘Vets Before Illegals’. Donc en gros, ‘Les Vétérans avant les illégaux’, faisant référence ici aux gens qui sont immigrés illégalement au pays. Donc on parle, évidemment d’un sujet polarisant, polarisant un peu plus sur la planète, mais particulièrement aux États-Unis où l’étude s’est déroulée.

Donc ces pages-là, envoyaient à la fois des messages positifs, mais aussi des messages polarisant. Et ce que ce type de contenu-là fait, ça polarise, ça divise, ça crée des tensions au sein de la population, ça crée des tensions entre les militaires et les vétérans et certaines franges si on veut de la population civile, puis ça crée aussi tout un paquet de frustrations, des sentiments potentiellement anti-gouvernementaux, quand les vétérans peuvent penser par exemple que le gouvernement met plus d’emphase ou s’intéresse plus à l’immigration qu’à soutenir finalement les individus qui ont donné leur vie et risqué leur vie pour leur patrie donc. Ça peut générer tout un paquet de conséquences négatives sur ce type de campagne de désinformation-là.

Capt Orton : Donc, sur le côté militaire aussi c’est sûr que ça peut être un problème?

Dominique Laferrière : Oui, malheureusement. Puis cet impact négatif-là, c’est un impact sur la sécurité nationale, puis la sécurité publique. Les militaires qui consomment de la désinformation peuvent en venir à utiliser l’entraînement qu’ils ont potentiellement même l’accès à de l’information ou l’accès à des armes de manière antidémocratique et qui génère un risque pour la sécurité nationale et un risque pour la sécurité publique aussi. Mais ça serait une erreur de penser que ces choses-là arrivent juste chez nos voisins du sud. Ça arrive aussi ici dans une moindre mesure et on espère que ça ne se reproduira pas. Par exemple, en 2020, il y a un Ranger canadien qui a foncé dans les portes de Rideau Hall avec son camion, qui était finalement rempli d’armes et ce que la cour a déterminé par la suite, c’est que son geste était motivé politiquement et que son intention était d’intimider le gouvernement du Canada. Et ce qu’on a aussi appris par la suite, c’est que cette personne-là consommait un certain nombre théories du complot et consommait aussi de la désinformation. Heureusement les conséquences ont été très, très, très minimes dans cette situation-là, mais les conséquences auraient pu être beaucoup plus graves. Donc voilà, une autre conséquence potentielle de l’intersection du nexus si on veut entre la désinformation puis les militaires.

Capt Orton : En termes d’évaluation de champ de bataille, quand on regarde des bombes ou des balles dans un conflit, c’est facile d’évaluer le montant de dommages, le montant de blessés. On peut voir les effets immédiatement. Est-ce qu’il y a un mécanisme pour évaluer l’impact des campagnes de désinformation?

Dominique Laferrière : À ma connaissance, non. À ma connaissance, c’est extrêmement difficile de mesurer l’impact direct d’une campagne de désinformation. Le cyberespace est populé, est surpopulé. Il y a de l’information à gauche à droite qui vient de sources multiples avec des intentions complètement différentes souvent divergentes. Et c’est extrêmement difficile d’établir une chaîne de causalité. Donc c’est difficile de savoir qu’est-ce qui a causé quoi exactement. Donc une campagne de désinformation, une fausse information Ça va être extrêmement difficile de voir ça va être quoi son impact direct puis ses impacts secondaires et tertiaires. Je pense que c’est un exercice qui est extrêmement difficile à faire.

Capt Orton : En termes de tactiques, qu’est-ce qui est souvent utilisé pour propager la désinformation?

Dominique Laferrière : La désinformation peut être propagée efficacement parce que les gens partagent l’information qui ont consommée ou qu’ils ont vue en ligne avec leur réseau. Et ça bien ça permet à l’information de se propager ultra rapidement. C’est pas vraiment une tactique, mais je pense que c’est une outil qui est particulièrement utile pour propager la désinformation.

En termes de tactiques plus spécifiques, on peut penser à des trucs comme l’hyper truquage, ou ce qu’on appelle en anglais le ‘deep fake’. Donc ça c’est des vidéos qui sont fausses ou qui ont été modifiées pour donner l’impression que quelqu’un a dit quelque chose ou a fait quelque chose alors que c’est faux. Ce qui est particulièrement dangereux avec l’hyper truquage, c’est que les vidéos sont très crédibles comme source d’information. On a tendance à croire que c’est vrai mais maintenant c’est de plus en plus facile de truquer ces vidéos-là justement pour leur faire dire et leur faire faire à peu près ce qu’on veut.

D’autres trucs un peu plus précis si on veut qui augmentent la probabilité qu’une campagne de désinformation devient virale, donc qu’elle soit partagée avec le plus de gens possible, on pense à des trucs comme à la personnification, ça j’en ai parlé un peu plus tôt avec les exemples que j’ai donnés, c’est l’idée de prétendre qu’on est quelqu’un d’autre pour bénéficier de la crédibilité de cette autre personne-là. Ce qui éventuellement peut rendre une information plus facile à partager. On peut penser à des trucs comme utiliser des sujets polarisant, donc des sujets qui divisent la société. Utiliser les émotions, particulièrement les émotions négatives comme la frustration et la peur est une stratégie assez efficace pour résonner avec un public cible, puis faire en sorte que la désinformation se propage encore plus loin.

Capt Orton : Et comment est-ce qu’on se protège contre ces tactiques-là ou ces attentats-là?

Dominique Laferrière : Une des meilleures stratégies, c’est la prévention. Donc, c’est augmenter les compétences médiatiques des gens, augmenter la littératie informationnelle. Ici, on parle d’augmenter la capacité d’un individu à trouver de l’information qui est crédible pour bien se renseigner finalement.

Il y a certains trucs plus spécifiques, par exemple il y a un modèle assez simple qui a été développé par un chercheur qui s’appelle Mike Caulfield et le modèle s’appelle le modèle SIFT. Donc SIFT est pour Stop, arrêter, donc prendre le temps, développer l’habitude d’arrêter quand on voit de l’information en ligne pour se demander si cette information-là est potentiellement fausse. La deuxième lettre c’est I pour investigate en anglais, donc enquêter en français. Ici l’idée c’est de chercher de l’information sur la crédibilité de la source qui est à l’origine de l’information. La troisième lettre, c’est F, find en anglais, donc trouver. Ici l’idée c’est de trouver d'autres informations ou de trouver des sources alternatives. Est-ce que quelqu’un d’autre finalement a rapporté cette information-là. Et la dernière lettre, c’est T pour trace, donc retracer, retracer le contexte original dans lequel l’information a été partagée. Si il y a une image ou une station dans l’information que vous consommez, est-ce que cette image-là vient d’une autre nouvelle par exemple ou d’un autre contexte donc l’idée c’est de retrouver ce contexte original-là.

Capt Orton : Comment est-ce qu’on arrête la désinformation à sa source?

Dominique Laferrière : À ma connaissance, il n’y a pas vraiment de façons de l’arrêter. Il faut vivre avec le fait qu’elle existe et qu’elle est là. Et c'est pourquoi nous, on préconise la prévention. Autant c’est parce que la désinformation est là, et il y en a beaucoup et la meilleure façon de se prémunir contre ça, c’est d’être capable de la détecter et de ne pas la propager davantage.

Capt Orton : Si on rencontre quelqu’un qui propage de la désinformation, qu’est-ce qu’on peut faire pour peut-être courber ce problème-là.

Dominique Laferrière : Il faut faire attention parce que des fois les gens deviennent campés dans leurs idées et c’est extrêmement difficile de les sortir de là. Donc une chose c’est sûr c’est qu'on ne veut pas aliéner ces personnes-là ou affecter négativement notre relation. Je pense un des trucs fondamentaux, c'est d’essayer de maintenir une relation positive avec ces personnes-là, puis de ne pas les juger, puis de ne pas agir comme si le fait que ces gens-là adhèrent potentiellement à des pièces d’information qui sont fausses, ou même à des théories du complot par exemple veut dire que ces personnes-là ont un problème, un problème de santé mentale ou quoi que ce soit. On n'est pas là-dedans. Donc l’idée c’est vraiment de rester le plus empathique possible. Je ne dis pas que ça va faire en sorte que la personne va arrêter de croire à la désinformation, mais si les personnes en plus d’adhérer à ces idées-là deviennent socialement isolées ou, encore pire, se créent un réseau social complet autour de ces pièces de désinformation-là, ça va être encore pire. Donc c’est important de s’assurer que ces personnes-là continuent à avoir des contacts sociaux positifs avec nous finalement.

Il y a un organisme en fait qui offre un webinaire sur comment interagir avec les gens qui sont tombés entre guillemets dans les théories du complot. C’est le centre de prévention de la radicalisation menant à la violence. Donc, vous pouvez consulter leur site Web.

Capt Orton : Il y a certains sites web aussi qu’on peut visiter pour aller vérifier la véracité de certaines histoires aussi?

Dominique Laferrière : Oui, absolument. Des sites de vérification des faits, au Canada il y a Les décrypteurs qui font de la vérification de faits, qui font un très bon travail. Je pense aussi à EU vs Disinfo. Donc ce site-là se spécialise sur les campagnes de désinformation russes particulièrement utiles en ce moment, particulièrement, pour les gens qui sont intéressés à en apprendre un peu plus sur les campagnes de désinformation autour de tout ce qui se passe en Ukraine en ce moment. Cette ressource-là est extrêmement utile. Puis ce qui est intéressant, avec ces ressources ou ces organismes de vérification des faits-là, c’est qu’ils nous demandent pas juste de prendre leur mot pour, permettez-moi l’expression-là, mais ‘pour du cash’. Ils nous expliquent comment ils et elles en sont arrivés à déterminer qu’une pièce d’information était vraie ou pas. Puis des fois, c’est pas une question de c’est vrai ou c’est pas vrai. Des fois c’est bien il y a certains éléments qui sont vrais, mais qui ont été un peu détournés et ça c’est vrai, ça c’est faux. Donc on a toute l’explication du processus finalement de vérification des faits qui a été fait par ces organismes-là. Puis ça, bien c’est hyper intéressant, parce que en tant que consommateur d’information, on a vraiment l’heure juste, mais on voit aussi tout le processus de vérification des faits puis on peut même essayer de reproduire certains de ces trucs-là nous-même là quand on essaie de vérifier si l’information qu’on consulte est vraie ou fausse.

Capt Orton : En parlant de développer des compétences médiatiques, est-ce qu’il y peut-être d’autres outils ou environnements interactifs qui existent pour travailler ces compétences-là?

Dominique Laferrière : Oui, il y a un certain nombre de jeux qui existent, qui ont été développés dans les dernières années, puis ces jeux-là sont basés sur le concept de l’inoculation. Donc le concept de l’inoculation, c’est l’idée qu’on peut protéger les individus contre la désinformation en les avertissant à l’avance qu’il et elle vont faire face à un message dommageable ou à un message nocif comme par exemple la désinformation et en leur donnant les outils pour combattre ce message nocif ou dommageable-là.

Dans le cas de la désinformation, les jeux dont je vous parle, je vais vous donner deux exemples de jeux, un c’est ‘Breaking Harmony Square’, l’autre c’est ‘The Bad News Game’. L’idée de ces jeux-là, c’est que vous êtes sur une plateforme, un réseau social inventé et votre but c’est de créer de la désinformation et de la propager à plus de gens possible. Donc, quand vous jouez au jeu, en gros, on vous apprend c’est quoi les tactiques qui sont utilisées par les créateurs de désinformation. On en a parlé un peu plus tôt, la personnification, l’utilisation de sujets polarisant, l’utilisation d’émotions fortes, particulièrement des émotions négatives, et alors que vous appliquez ces techniques-là, et que votre campagne de désinformation va de plus en plus loin et se rend à plus de personnes, vous gagnez des points. Donc, on vous récompense pour être un bon officier de désinformation. En jouant au jeu, vous apprenez comment les créateurs de désinformation développent leur campagne, comment ils réfléchissent à leur campagne pour qu’elle se rendre à plus de gens possible. Et l’idée, c’est que quand vous allez sur vos réseaux sociaux ou sur Internet, en gros, ça va aiguiser nos compétences médiatiques et augmenter la littératie informationnelle.

Capt Orton : Donc avec toutes ces discussions-là, c’est qu’est-ce qu’on peut faire dans le présent, qu’est-ce qui se passe dans le présent, où s’en va-t-on avec ça?

Dominique Laferrière : Bien je pense que on s’en va vers une amélioration de l’intelligence artificielle, donc par la force des choses une amélioration des stratégies un peu plus techniques comme l’hyper truquage dont j’ai parlé un peu plus tôt. On est déjà à un point où l’hyper truquage est assez réaliste-là, je ne sais pas si vous avez vu des vidéos hyper truquées, mais c’est quand même assez bien fait. Donc, d’après moi, évidemment je n’ai pas de boules de cristal, mais d’après moi on s’en va vers une amélioration, ou un perfectionnement de ces stratégies-là. Évidemment toutes ces choses-là ont des impacts positifs potentiels-là, si on parle à la création, si on parle à la production de films de série télé, c’est des outils absolument brillants, mais tous ces outils-là peuvent aussi être utilisés à des fins dommageables, à des fins nocives. Malheureusement, je pense que c’est vers ça qu’on s’en va puis ça remet l’importance sur ce que je disais un peu plus tôt de la prévention et d’augmenter les compétences médiatiques, puis la littératie informationnelle-là dans la population.

Capt Orton : Donc, vérifiez vos sources primaires, vraiment.

Dominique Laferrière : Oui, vérifiez vos sources primaires.

Capt Orton : Bien, merci beaucoup d’avoir pris le temps de nous parler.

Dominique Laferrière : Ça me fait plaisir.

Capt Orton : Si vous voulez en savoir plus au sujet de la désinformation, tel que les jeux ou les ressources, regardez dans les notes du balado. On a les liens pour tous les sites Web dont on a discuté aujourd’hui.

[Musique commence]

Ça c’était Dre Dominique Laferrière qui est une spécialiste des sciences sociales qui travaille avec les Forces armées canadiennes.

Moi je suis capitaine Adam Orton pour Le balado de l’Armée canadienne, prenez soin de vous.

[Musique termine]

© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, représenté par le ministre de la Défense nationale, 2024